dimanche 29 août 2010

Discours d'artistes

Richard Vaskelis, peintre












VASKELIS REJOINT BONNARD
Richard Vaskelis, peintre (1947-2010)
par Désirée Szucsany

La semaine dernière, j’ai téléphoné à Richard pour qu’il m’accorde une entrevue. «Il est à Québec, il revient la semaine prochaine», me répondit sa compagne. J’apprends ce matin par Michel Normandeau que Richard nous a quittés hier, à la suite d’un anévrisme. Quel choc! Son oeuvre survit, palette brillante et lumineuse, objets appétissants et composition poétique qualifient ses tableaux. Il a immortalisé la rivière Rouge, un de ses lieux préférés, et d’autres paysages des Laurentides tout aussi séduisants. Au cours de l’été 2009, il m’a donné un coup de main, alors que nous exposions à la boutique de Kevin Radcliffe, au vieux village de Mont-Tremblant. Vaskelis a toujours pris l’art très au sérieux, il a d’ailleurs étudié sous la direction de Arthur Lismer, du Groupe des Sept. Plus près de nous, il a inauguré la salle des arts de l’hôtel de ville de Mont-Tremblant, en 2005. Et pas plus tard que la semaine dernière, il inaugurait une salle d’exposition à la boutique Archange, au petit hameau, avec Normandeau. Je voulais lui demander ce qu’il pensait de la situation des arts en 2010.

En son hommage, je reproduis la réponse qu’il me donna en 1999, dans Artistes. Peut-être aurait-il eu de nouveaux commentaires à formuler? Voici ce que pensait Vaskelis, il y a une dizaine d’années.

Il est fondamental de s’interroger

Richard Vaskelis aime la beauté, il la chérit, la cultive et s’y attarde à tout moment. Ce peintre dont le nom est d’origine lithuanienne, se régale, à butiner les fleurs dont il parsème son atelier. Des bouquets savamment ordonnés surgissent ici et là dans son antre. Sur le buffet, sur la table, sur le bord de la fenêtre d’où l’oeil s’échappe vers le lac Brunet. Richard Vaskelis ne rate aucune occasion de rendre hommage au beau. Il aime peindre les ambiances intérieures, un petit coin gentil et chaud, un visage d’ami. «J’aime faire des portraits explique-t-il, cela crée une intimité qui me ravit».

Le romantisme imprègne les lieux où vit Richard Vaskelis. Il peint depuis quarante ans mais ce n’est pas du passé dont il veut parler. Assis à la table, accompagnés de la lumière douce d’automne, celle qui adoucit les traits, nous discutons à bâtons rompus. Sur la table, un café chaud, un morceau de pain, de vrai pain, un doigt de cognac pour calmer la toux, et du fromage. Richard parle de l’ignorance, sa bête noire. Il est inquiet. «On vous dresse, on garde un peuple dans l’ignorance. Les gens en viennent à ne plus se poser de questions. Alors que dans d’autres cultures, c’est fondamental de s’interroger».

Maintenant ou jamais

Comment l’artiste combat-il cette situation? En se disant chaque jour, c’est maintenant ou jamais. Et il empoigne ses pinceaux, il travaille, là, tout de suite, chassant la paralysie qui peut le gagner comme tout être vivant et sain devant le désert de l’ignorance dans laquelle la société s’enlise parfois longtemps. Il remarque : «L’artiste peut être conscient, ça dépend de l’artiste. Il peut faire comme tout le monde, prendre une pilule pour s’endormir, fermer les yeux sur le fait qu’il n’y a pas d’homme ou de femme politique à la hauteur pour éviter la décadence, regarder un cinéma qui ne lui ressemble pas et gober l’identité des autres, accepter la manipulation. Ce n’est pas tout le monde qui réfléchit, qui veut voir clair. Il est facile de semer le doute chez les faibles», pense Vaskelis. Le grand fléau de notre temps? Il le répète, l’ignorance, qui entraîne la pauvreté et la misère. L’instruction, la connaissance, sont les armes les plus redoutables pour se défendre. Et celle-ci est disponible. Cela dépend où tu vis, souligne-t-il. Au Québec, trouve-t-il, au niveau des arts, en musique, en littérature, en peinture, il y a un manque. Le milieu est fermé à ces options, l’art est marginalisé, il n’est pas dans les foyers.

Apprendre la beauté

Selon Vaskelis, c’est un stéréotype du colonisé. Un refus de prendre position. Il s’alarme contre le fait que les seuls instants où les gens pensent au bonheur des autres, c’est quand ils écoutent une pub mielleuse distillée pendant trente secondes à la télé. «On peut même vous faire avaler que vous trouverez un ami à la pharmacie», s’indigne-t-il. «Quand à l’art pour l’art, il fait partie de notre problème. Il y a plein d’humoristes. Est-ce tout ce qu’il nous reste, rire de soi et des autres? C’est un symptôme de perte de liberté Si tu rouspètes, on te dit, va-t-en chez vous! L’expression de chacun est affectée. L’art est dans un étau. Pourtant l’art existera toujours!» Il fait une pause. «Il y en a qui font des expériences et qui passent pour des artistes. Et chez les tenants de l’art officiel, le figuratif n’est pas reconnu. On dirait que si les gens peuvent comprendre l’image qui figure sur un tableau, cette image n’est pas de l’art. L’art n’est pas un refuge, c’est une qualité de vie destinée au plus pauvre comme au plus riche. Les plus beaux moments de ma vie ne sont pas liés à l’argent. La peinture me procure beaucoup d’équilibre. C’est là que je suis le plus honnête, que mon art me dicte le respect. Je ne triche pas, je ne prends pas de raccourci. Je crois en ce que je fais. Pour un peintre, ce qui est important, c’est la vision. Il y a tellement de choses extraordinaires, pourquoi passer à côté? Si tu passes à côté, tu fais comme tout le monde, et tu es juste un peintre. Pas un artiste.» Quand on expose, on a un rôle : démontrer qu’il y a de la beauté dans la vie. Montrer ce que les autres ne voient pas. «J’ai développé mes yeux comme un musicien a développé ses oreilles. J’aimerais dire aux gens que les yeux ne servent pas seulement à identifier, mais également à découvrir, à élargir ses horizons. L’art n’est pas nécessairement beau. Ce n’est pas un secret. C’est une question de connaissance, de savoir reconnaître les lignes harmonieuses, l’ingéniosité. On apprend la beauté comme on apprend l’amour. Le rôle d’un artiste est de rappeler au souvenir des êtres humains d’ouvrir les yeux.»

vendredi 27 août 2010

Sociologie de l'art

PAVANE POUR UNE INFANTE DÉFUNTE
par Désirée Szucsany

Devant les sculptures flottantes, je pense au phénomène cubain que Fernando Ortiz nommait la transculture.

Quel mot!

Il exprime les phases de transition d’une culture à une autre par opposition à acculturation, mot anglais à saveur colonialiste, désignant l’adoption d'une culture. Transculture implique la perte des racines et la création de nouvelles boutures. Le produit final? Des phénomènes culturels sous la bannière de la néoculture.

L’ouvrage rassemble des textes sur les sujets liés à ce concept vieux comme les trottoirs. L’eau rase des villes entières? Il faudra oublier l’ancien modèle et inventer du nouveau. Oui, il faut s’adapter, le monde change vite et, malgré la stabilité des oeuvres, leur ancrage ingénieux, les arrimages sont précaires. La guerre vous déporte en d’autres terres? Dès que vous serez reposé, vous planterez une plante jamais vue en ces contrées, tiens, du basilic, par exemple. Vos voisins y goûteront, surprise! Ils l’adopteront et le mélangeront à la poutine. Un anthropologue notera ce changement.

Pas seulement à Cuba

Ortiz était conscient de la limite scientifique. Certes, l’anthropologue doit dresser un rapport. La science se renouvelle à condition d’y verser un concept et il décida d’agir, précisa les étapes du phénomène et innova le mot transculture. En inventant, on a plus de chance d’accéder au monde. Ou au Nouveau Monde? C’est l’impression que donnait la revue ViceVersa. Le livre est un scellé apposé sur cette époque. La transculture et ViceVersa, réunit des textes et des réflexions d’historiens, cinéastes, poètes, illustrateurs, graphistes et autres créateurs de la distinguée revue (1). Les Dialogues croisés sont particulièrement vifs. L’épopée du photographe Duclos, la vision de Daigle et des autres interlocuteurs «derrière l’image», sont de piquants ajouts, des secrets percés. La qualité des images dans ViceVersa réjouissait l’esprit et il est passionnant que les artistes eux-mêmes nous apprennent pourquoi nous aimions la revue, infante de la première génération, désormais défunte.



(1) Caccia 2010, Bruno Ramirez et Lamberto Tassinari, La transculture et ViceVersa, Éd. Triptyque, 218 p.

PLONGER DANS L'AMBIANCE

Journée d'été au parc du Mont-Tremblant
huile par Michel Normandeau











Michel Normandeau, peintre

par Désirée Szucsany, historienne d'art


Michel Normandeau laisse des traces dans le paysage culturel. Il habite à la Conception depuis plusieurs années. Ses parents sont installés dans les Laurentides depuis 1971. Dès l’enfance, Normandeau suivait le rituel de fuir la ville vers les Laurentides, s'échapper pour enfin respirer et goûter la quiétude. Vivre à la campagne ne l’empêche pas de descendre en ville. Il aime prendre un bain de foule et plonger dans l'ambiance citadine.

Des gants de boxe aux pinceaux

Le peintre est originaire de Montréal. Écolier, il adorait les cours d'arts plastiques et dessinait sans cesse. Les autres matières scolaires ne le fascinaient pas, les mathématiques lui donnaient du fil à retordre. Un jour, une mastoïdite se déclare et le cloue au lit. «Pendant la convalescence, explique Michel, je ne devais faire aucune activité ou presque, alors j'ai dessiné et peint. Pour me tenir tranquille ma mère m'a acheté un ensemble de peinture à numéros. Ne riez pas, ce n'est pas con!»Ce jeu de coloriage a le mérite d'enseigner les nuances de la peinture. «Adolescent, j'ai délaissé la peinture. J'étais d'un tempérament impétueux, et j'ai suivi des cours de karaté jusqu'à la ceinture noire. Je me suis entraîné à la boxe, ce qui m'a mené jusqu'aux Gants Dorés.» Il était poids léger et se défendait assez bien. Ce n'était pas assez. Michel aime repousser les limites. «Alors j'ai enfourché le vélo et j'ai pédalé, pédalé jusqu'à n'en plus pouvoir.» Il travaillait en publicité et partageait son logement avec des cyclistes. C’était à Ahuntsic, près de l'église Saint-André-Apôtre.

Rencontre décisive

«C'est là que je me suis remis à la peinture, après avoir vu une photo dans le journal. L'illustration représentait un pingouin sur fond de glacier et bleuté. J'ai trouvé l'image magnifique, je n'avais qu'une idée en tête, celle de la reproduire.» Il est allé chez le marchand de couleurs. «Je lui ai demandé de la peinture à l'huile!» En évoquant ce souvenir, il rigole, ce n'est pas évident de dompter l'huile quand on a le geste spontané. Doué d’une volonté de fer, il est parvenu à peindre son pingouin. Voyant Michel à l'oeuvre, le curé de l'église lui dit : «Il faut que tu rencontres Jean-Marcel Bourbonnais, le peintre qui vit en bas de chez toi.»«J'ai beaucoup appris avec Bourbonnais, souligne Michel. Quand j'ai perdu mon travail, je suis allé le voir. Il m'a dit : ««Qu'est-ce que tu vas faire?» J'ai répondu : «Je vais peindre.» S'il voulait devenir peintre, soit! «Mais il faut que tu sois le meilleur! Le meilleur de toi-même!» Pendant un an Michel Normandeau peint sans relâche, apprivoisant la composition, les contrastes et les sujets. Il recycle des panneaux publicitaires. Il les découpe et s'en sert comme toiles.

Peindre sur le motif

Depuis cette époque, Normandeau creuse son intériorité et la remplit de scènes qu'il trouve belles, la nature est un des principaux éléments qu'il met en vedette. Il plante son chevalet au milieu de la neige, des prés ou des routes rurales, il écoute les ruisseaux. Capter ces moments précieux, c’est sa passion, sa façon de rendre hommage à la vie. Il veut toujours en apprendre plus. Il étudie le procédé a tempera. Il s'agit de délayer une couleur dans l'eau, d'y ajouter un agglutinant, un oeuf, par exemple. Il adore visiter Charlevoix, la France et tous les lieux où l'art est bien accueilli. Les projets ne manquent pas à ce solitaire qui aime les humains et les bêtes. Il a peint Toupet, un oiseau qui lui tenait compagnie tous les jours à l'heure de peindre. «Toupet est mort, peut-être à cause de la peinture, c'est un peu toxique», soupire Michel en pensant à son fidèle compagnon. Il ne s'accroche pas au passé, ses yeux dévorent l'avenir. «Pour l'instant je suis un peintre traditionnel. Remarque, ce n'est pas une tendance coulée dans le béton. Qui sait ce que je peindrai dans dix ans? Une catastrophe, peut-être?»

Expositions de Michel Normandeau



Boutique Archange, Saint-Jovite, 2010
Gare de Mont-Tremblant, 1999-2010
Semaine des arts de Saint-Jovite, 1999
Club Tremblant, janvier 1999
Peinture en direct, Vendredi 13, Ste-Lucie, novembre 1999
Peinture en direct, novembre 1999, Brasserie St-Arnould

jeudi 26 août 2010

LA BELLE EST VENUE

par Désirée Szucsany, historienne d’art


Néfertiti, reine d'Égypte il y a environ 3300 ans
Les puissants réforment parfois les arts dans leur société et imposent une nouvelle esthétique. En Égypte, le roi Akhenaton voit le soleil comme unique divinité, il ferme les temples des autres dieux. Les artistes le représentent se promenant dans les rues, sur un char, et plaisantant avec sa grande épouse royale Néfertiti et leurs enfants (1).

Bek, Auta et Nutmose

Parmi ses artistes préférés, Bek, Auta et Nutmose s’empressent d’oublier la tradition qui cultive l’idéalisme froid et redondant. Avec réalisme, ils donnent de l’expression aux visages souverains. Ils se conforment aux conceptions vitalistes que le jeune roi professe, peignent les plantes et les animaux avec un amour du détail qui a été rarement dépassé. Ainsi naît l’art amarnien, du site Tell el-Armana, nom arabe de la capitale Akhetaton, fondée par Akhenaton.

Égyptologie au Château

En France, le Château de Gordes présente une exposition qui évoque la redécouverte de l’Égypte antique. Elle réunit des objets égyptiens à comparer aux dessins des savants du XIXe siècle, les livres parmi les plus rares et les plus spectaculaires de l’égyptologie ainsi qu’une restitution virtuelle de la cité d’Akhenaton et Néfertiti.

(1) Le cartouche de la reine Néfertiti porte, entre autres, l’inscription «La belle est venue».
Akhenaton est né vers -1355 av. J.-C. et Néfertiti, vers -1370.

Exposition :
Égypte
Grandes expéditions
XVIII et XIXe siècles
Château de Gordes (France)
Du 26 juin au 26 septembre 2010
Horaire d’ouverture : 10-18h
Office de tourisme de Gordes : 04 90 72 01 75

mercredi 25 août 2010

TOUJOURS À LA PAGE

Christiane Olivier : l’autre psychanalyse
par Désirée Szucsany



Les enfants naissent tous sous la même étoile et grandissent sous des influences différentes dont l’impact ne tarde pas à se manifester dans la vie de l’être humain. C’est ce que déclarait en 1983, Christine Olivier, femme et analyste. Elle s’intéresse plus particulièrement aux conséquences de l’empreinte maternelle sur les comportements de la fille et du garçon (1).

«À l’ombre de la mère, Jocaste, personnage absent de la théorie freudienne où Oedipe règne, souligne-t-elle, grandissent également des filles qui, un siècle après Freud, forment le groupe de la population le plus souvent atteint de dépression, comme le démontre les statistiques.»

Rôle jocastien

L’enfant a un rôle oedipien plus précoce que Freud ne le pensait, explique Dr Olivier qui est de formation lacanienne «sans en avoir accepté toutes les implications», précise-t-elle.

Dès l’âge de 18 mois, soit à la reconnaissance des sexes, on peut remarquer des différences de comportement entre les garçons et les filles. Ces dernières, par exemple, sont les plus précoces du point de vue du langage. Pourtant, la mère éduque ses enfants de la même façon.

«D’où cette différence provient-elle?» interroge Dr Olivier.

Les soins et l’éducation sont monosexués alors que les enfants sont de deux sexes. L’enfant n’est jamais que la réponse au désir de la mère et sa prévenance. Cependant la mère se fixe de façon élective à son fils. Le fait que ce dernier soit sexué provoque des remous en elle, consacrant le fils comme objet de désir. L’éveil des possibilités sexuelles est un rôle parental au même titre que celui de l’identification. Freud a d’ailleurs admis la nécessité d’avoir une Jocaste. Mais qui tiendra ce rôle auprès de la fille?

Laïos, père absent

L’identification est un piège pour les femmes, poursuit Dr Olivier, déclenché par l’absence du père, ce Laïos de la tragédie grecque de Sophocle. Qu’advient-il de la petite fille s’il ne la «paterne» pas, s’il n’est pas là pour ressentir de l’émoi et du plaisir en la découvrant avec son corps?

Non reconnue comme objet de désir, ne s’identifiant à personne parce que dans un premier temps elle n’a pas les «attributs» de sa mère, elle grandit en sagesse. Cependant, elle apprend vite à parler pour dire son insatisfaction. Elle devient une polytechnicienne angélique, enfermée par sa mère dans un projet de femme. Vers l’adolescence, pour la première fois de sa vie, elle s’aperçoit qu’elle est désirée : c’est sa première histoire d’amour, un choc souvent immense, alors que pour son frère, il s’agit d’une simple répétition de sa première histoire d’amour, vécue avec sa mère. La petite fille grandit entre son corps et sa tête. Ce clivage est lourd de conséquences.

Dr Olivier cite, entre autres, l’exemple des femmes anorexiques dont le nombre croît sans cesse. «Ces femmes ont très souvent un intellect puissant. Devant le choix inévitable d’être ou non un objet de désir, elles préfèrent le second. En refusant de manger, elles se débarrassent de ce corps, qui nuit à leur projet.»

Dans d’autres cas, la femme réclame sans cesse d’être regardée, appréciée ; elle multiplie les effets et sa plainte qui se traduit physiquement, débouche souvent sur la dépression. L’homme qu’elle côtoie ou qu’elle épouse temporise sans cesse, mais en vain.

À l’âge de la ménopause, les objets de gratification dont elle s’est entourée lui échappent, y compris ses enfants, ce qui lui fait dire qu’elle n’est rien, parce qu’elle n’a rien. Pourtant, «ça ne peut pas être l’hiver, on n’a pas eu d’été», cite Mme Olivier en se référant au film de la cinéaste québécoise, Louise Carré.

Dans les nouvelles familles, l’éducation et les soins partagés réhabilitent la présence du père et il y a tout lieu de croire que l’homme nouveau, tant réclamé par les féministes, est en train de naître. Il caresse et reconnaît sa fille, heureux de la réciprocité de l’émoi ressenti, car il est plaisant de reconnaître et d’être reconnu.

Le père n’est plus métaphysique mais physique et palpable : il se nomme et raconte lui-même son histoire. «Ainsi la menace de l’échafaud qui pesait sur toutes les reines que sont les mères s’éclipsera-t-elle enfin?» de terminer Mme Olivier.





(1) Olivier 1980, Les enfants de Jocaste, éd. Denoël/Gonthier, Paris7. Mme Olivier a présenté une conférence au XVIIIe Congrès annuel de l’Association des psychiatres du Québec, en 1983.

mardi 24 août 2010

BRILLANCE DES TOUCHES

Voir de l'autre côté
aquarelle, par Monique Bélisle, 2008













Monique Bélisle, aquarelliste
par Désirée Szucsany,
historienne d’art


Monique Bélisle est née à l'Ascension, dans les Laurentides. Elle commence l’aquarelle en 1989, étudie la technique avec Élise Miron. Ses thèmes s’inspirent de l'environnement, la nature et les jardins. Elle travaille sous la lumière du jour, l’éclairage diurne orne ses aquarelles et leur fournit de la profondeur.

Aquarelle : lieu de texture
La surface du papier est remplie et concentre les objets de la représentation : fleurs, touffes, feuilles, feuillages, verdure se déploient en mouvement. Parfois un élément du mobilier propre aux jardins, une chaise, un banc, s'insère dans la composition et rappelle la présence humaine dans la nature indomptée qui invite à la contemplation. Si l'humain s'absente de l’ensemble, les pinceaux comblent les lieux de textures aux apparences de tissus exotiques. Voilà l'originalité ou la manière de madame Bélisle.

Les teintes ne sont pas celles que l'on attend de la nature ou de l'aquarelle. À son insu peut-être, Monique ne reproduit pas la nature statique, captée à telle heure de la journée. Ses aquarelles ne se limitent pas à cadrer une scène donnée, proposent plutôt un sujet suggérant une échappée, un envol. Le temps agit sur l'oeuvre. Les forces naturelles s'affrontent et créent une tension. L'oeil s'échappe grâce aux lignes définies par les nuances, les camaïeux se heurtent. La brillance des touches crée la perspective. Les courbes deviennent serpentines. Un coup de vent soulève les coins des formes asymétriques de façon légère, une jupe se retrousse pour dévoiler les chairs de la couleur.

Tentation de l’abstraction
L'artiste s'autorise à dessiner des objets très reconnaissables. Le trait, la précision séduisent l'oeil, guidé par un bout de ruban ou autres objets de la couture. L'oeil aime se tourner vers un point de repère. Naturellement, il cherche un repaire où s'abriter. La décision de placer ces petits objets de l'intimité féminine, objets de création en soi, ravive la fluidité des éléments qui, peu à peu, tendent vers l'abstraction.

Une telle astuce dirige le regard sur les portions réservées aux objets réalistes, qu'il s'agisse d'un bâtiment, d'une racine ou d'un tronc d'arbre. Ils apparaissent, merveilles du monde connu, et cernent la réalité fort agréable : la palette de l'aquarelliste s’enrichit de valeurs s'inclinant devant la dominante. La maîtrise de ces choix libère les niveaux de lecture et invite à passer d'un palier à l'autre sur un rythme nerveux, urbain et même jazzé, collant au caractère de l'artiste.

Monique Bélisle a le sens du détail et produit des aquarelles de petits et moyens formats. L'expérience visuelle de ses oeuvres est vaste. À souligner, l'artiste offre une part d'espace aux éléments qu'elle voit dans la réalité, privilège ou preuve de leur mémoire dans l'univers visuel qu'elle construit. Sa manière démontre peut-être que son art n'est pas la servante de ce qui l'entoure, ni de ces racines, plantes ou bâtiments. Dans son royaume de couleurs, ils ont toutefois une place de choix. L’artiste ne cultive pas le passéisme. Mélancolie, nostalgie ne sont pas dans son champ. Le regard y danse et le traverse librement.


Expositions de Monique Bélisle

À l’atelier de Monique, 2009
21ième exposition d'arts visuels, Ste-Anne-des-plaines, 2006
Semaine des arts à Saint-Jovite, 19 au 22 septembre 1996
Poudrière St-Luc, à Brouage, Charente-Maritime, France, 3 au 21 juillet 1996
Prix du jury de la semaine des arts de Saint-Jovite, 24 septembre 1995
Responsable du volet exposition de la Maison Chaumont, 1997-1998

dimanche 22 août 2010

MIMÉTISME


Mimétisme 

Ni zèbre ni caméléon

Mimétisme exprime la capacité d’adaptation à se fondre dans le décor et la société. L’art aussi utilise cette stratégie pour s’intégrer dans les intérieurs et les paysages.  Parmi les tableaux, plusieurs techniques mettent l’accent sur le relief. Les huiles sur toiles sont dessinées à la pointe sèche, les fresques gravées sous la forme très ancienne des inscriptions, rehaussées par l’encre ou l’huile.  

Il n’y a pas de caméléon ni de zèbre! Ces animaux sont célèbres, ils ont le «talent» d’imiter la couleur de leur milieu ou de leur environnement.  C’est à faire rêver tous les peintres. Dans l’exposition Mimétisme, des matériaux légers servent de support aux oeuvres et imitent la pierre, les parois rocheuses, le mur rupestre, et donnent la sensation tactile de la caverne.  Parfois un élément est ajouté, partition de musique, livre, ou objet du monde moderne pour marquer le temps de leur création.  Car, j’insiste là-dessus, malgré les apparences,  ces oeuvres sont des oeuvres modernes! Même si l’on peut se méprendre devant certaines d’entre elles qui révèlent des techniques d’art préhistorique, utilisées il y a dix mille ans. Nos lointains ancêtres écrivaient l’histoire ou la gravait, sur les pierres. Avant d’inventer l’écriture, ils ont dessiné, stylisé, simplifié.  

Comme je ne peux transporter des pans de pierre dans la maison, encore moins les accrocher aux murs en raison de leur poids, j’ai pensé à adapter le support à nos intérieurs. Cette adaptation est une forme de mimétisme en art. Et j’en ai fait le thème de l’exposition.

Désirée Szucsany
artiste






MIMÉTISME
EXPOSITION de FRESQUES, HUILES ET ENCRES
Par Désirée Szucsany
Du jeudi 16 septembre au dimanche 3 octobre 2010
VERNISSAGE Jeudi, 16 septembre à 19 heures
Séance de «poésie gyproc», 25 septembre, 14h

Horaire
Mercredi : 13 à 17h
Jeudi et vendredi : 13 à 21 h
Samedi et dimanche: 10 à 15 h

Salle Alphonse-Desjardins, Hôtel de ville Mont-Tremblant
1145 rue de St-Jovite, Mont-Tremblant

Autoroute 15 Nord et route 117 Nord, Sortie Mont-Tremblant
Informations : Désirée (819) 688-2117, courriel : desz5@hotmail.com
dszucsany.blogspot.com